Témoignage de M. André Mauras de Montigny-Ie-Bretonneux (Yvelines)
« Pierre fut achevé à bout portant... » | |
Pierre Rialland à 22 ans
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" Je me dois de vous témoigner, étant le seul survivant d'un épisode postérieur au drame du maquis de Saffré, que j'ai vécu également, étant l'agent de liaison de Briac Le Diouron, alias Commandant Yacco.
Après la dispersion des maquisards de la forêt de Saffré, suite à l'attaque du 28 juin 44, je me suis retrouvé hébergé dans la région de Pannecé, chez Pierre CouIon, à la Boraire, où j'ai participé aux travaux de la ferme et repris mes liaisons à l'Initiative de Yacco pour reformer les groupes de maquisards et poursuivre les actions contre l'occupant. Pierre Rialland, un jeune agriculteur de Joué-sur-Erdre, échappé également de la forêt de Saffré, s'est employé activement, durant le mois de juillet, à reconstituer les éléments épars, en vue de harceler les troupes allemandes qui se repliaient.
Le 4 août, le regroupement devait être effectif au lieu-dit le Boulay entre Nort et Ancenis. Pierre Rialland et Yacco vinrent me chercher au début de l'après midi à la femme de la Boralre pour reprendre nos armes camouflées à proximité et nous partîmes aussitôt à travers champs vers le lieu de rassemblement, évitant les convois allemands, des charrettes hippomobiles, pour ne pas nous faire repérer. Le franchissement des haies étant devenu difficile, nous décidâmes d'emprunter la route goudronnée D9 (aux environs de Teillé), Pierre et Yacco marchant sur le côté droit, et moi, un peu en retrait sur le côté gauche quand, subitement, dans un virage, nous nous trouvâmes face à un peloton de cyclistes allemands, une cinquantaine selon les habitants de villages voisins.
Yacco et mol étions armés de mitraillettes et Pierre d'un mousqueton. Nous ouvrîmes le feu les premiers, occasionnant des pertes à l'ennemi qui riposta très vite, blessant Pierre qui ne put franchir la haie et fut achevé à bout portant (sans doute par l'officier qui commandait le peloton). Yacco et moi, chacun de notre côté, réussîmes à nous mettre à couvert et à nous échapper sous un feu nourri qui, heureusement, ne dura pas très longtemps, l'ennemi nous ayant perdu de vue. Je regagnai la Boralre dans la soirée, rejoint dans la nuit par Yacco, légèrement blessé. Le lendemain, à bicyclette, nous rejoignîmes le lieu du combat pour apprendre par les voisins que le corps de Pierre, trouvé étendu dans le fossé, avait été transporté à la mairie de Teillé, où une chapelle ardente avait été dressée. C'est là que nous le retrouvâmes. Pierre Rialland avait 22 ans et moi pas encore 17. Une stèle à la mémoire de Pierre, un peu en retrait de la route actuelle, rappelle aujourd'hui ce tragique épisode. L’an dernier, venu m'y recueillir après 60 ans, j'al été déçu de constater que l'entretien par la commune laissait à désirer. Ses frères et sœurs, qui viennent chaque année en pèlerinage, le déplorent également. " (Journal Ouest-France, André Mauras le 19/04/2005)
Le Colonel André MAURAS est décédé le 12/12/2007 |
[Notes de Noël Bouvet du 19/01/2006 et mise à jour du 28/04/2008 :
1) Originaire de la commune de Joué-sur-Erdre du canton de Riaillé, Pierre RIALLAND avait été arrêté à la frontière espagnole en tentant de rejoindre les forces combattantes françaises de l’extérieur. Il avait été condamné à la déportation et s’échappa en sautant du train en marche. Il fut recueilli sans connaissance par un garde barrière de la S.N.C.F. et resta une semaine dans le coma. Il revint en Loire-Inférieure grâce aux cheminots. Il fut l’un des maquisards les plus dynamiques de Maison-Rouge, puis de Saffré. Il fut tué en se rendant au Boulay rejoindre, probablement, un commando de maquisards pour tenter d’arrêter un train de déportés. L’attaque devait avoir lieu à Saint-Mars-du-Désert , une trentaine de déportés réussirent à s’enfuir, mais 4 furent repris et fusillés immédiatement.
Soixante ans plus tard les témoignages des personnes non présentes lors de l'échauffourée du 4 août 1944 concordent difficilement avec la réalité. Celle-ci ne peut que coïncider avec les récits des deux maquisards rescapés. Vous trouverez le récit écrit de Briac Le Diouron (Yacco) sur ce site, "Soldats de l'Ombre, chapitre 1944-2". André Mauras, quant à lui, se souvient parfaitement, parallèlement à Yacco, avoir tiré pendant quelques secondes des salves de mitraillette sur les Allemands, avoir vu certains d'entre eux s'écrouler, puis s'être enfuit. Yacco dut faire de même. Contrairement à ce qui est rapporté parfois, Pierre Rialland n'était pas armé d'une mitraillette. Il portait en bandoulière un mousqueton, une arme plus précise mais plus longue à mettre en oeuvre. Nul ne peut affirmer que son fusil s'enraya. Pierre fut probablement le dernier à s'enfuir et la cible privilégiée des cyclistes Allemands. André Mauras n'utilisa pas de grenades et ne pense pas que ses deux compagnons en firent usage.
2) M. André MAURAS (alias Condé), tout comme M. Henri MAINGUY et M. Briac LE DIOURON (alias Commandant Yacco) était réfugié à Riaillé. Plus précisément, il était à la Cour-du-Bois dans la famille Lechat, il n'y résida guère car Enfant de troupe, il s'engagea à 16 ans dans la Résistance, et servit notamment d'Agent de liaison au commandant Yacco. Il continua la lutte après le dispersement du maquis de Saffré et participa aux combats contre la poche de Saint-Nazaire dans la région de Plessé, puis au sud dans celle de Pornic. Il suivit ensuite une formation d'Officier à Saint-Cyr / Coëtquidan et fit carrière dans l'Armée avant de se reconvertir dans le secteur privé à un poste d'encadrement.
3) Une collecte, parmi la population de Teillé, fut organisée dés août 1944 par une poignée de Teilléens et de réfugiés pour ériger un Monument rappelant le sacrifice de Pierre Rialland et son refus du national-socialisme allemand. A l'origine, le monument se situait dans le fossé à l'endroit même où fut découvert son corps.
4) Suite à une rectification de tracé de la route, le monument fut déplacé en 1965, sur demande du Commandant Yacco, par M. Jo PUREN (ancien maquisard de Saffré) et M. LE BRUN voisin et ami de ce dernier. Tous les deux étaient maçons. Les photographies ci-dessous ont été communiquées par Mme et Mlle LE BRUN, épouse et fille de M. LE BRUN décédé. Elles furent prises lors de l'inauguration du Monument en 1966 à son emplacement actuel, et lors de la décoration de M. Jo Puren ancien maquisard. Vous pourrez y reconnaître MM. Jo Puren, Briac Le Diuron, Pierre Fraboul, Francis Paitier, etc.
5) Suite à une action de l'Association locale des AFN, et sur proposition de son Maire, M. Claude DABO, le Conseil Municipal de Teillé, lors de sa séance du 7 juin 2005 a pris la décision de faire redresser le monument par le Service technique de la Commune et de confier la restauration du monument à l'association des Anciens d'A.F.N. et son entretien ultérieur à l'A.R.M.A.T. (Association de Restauration des Monuments Anciens de Teillé).
Le 4 août 2006, à la demande de M. André MAURAS une plaque commémorative fut inaugurée. Selon Ouest-France, la cérémonie regroupa 200 personnes.
MERCI DE TOUT COEUR à la Municipalité et aux anciens combattants de Teillé, au nom des personnes proches de Pierre RIALLAND, de ses amis maquisards encore en vie, de toutes les personnes qui n'ont pas oublié l'action de Pierre et des combattants de 1939-1945 dans les forces françaises de l'extérieur et de l'intérieur. Ces hommes ont contribué à la libération de notre pays du NSDAP allemand (National Sozialistische Deutsche Arbeiter Partei (ou, en bon français, le Parti National Socialiste des Travailleurs Allemands), le plus souvent dénommé Parti Nazi, ou encore, de nos jours, pour faire oublier le mot Socialiste, le Parti Fasciste ou le Parti Populiste. Ils ont redonné à la France sa place de grande nation. Sans leur action la France ne figurerait pas aux Nations Unies parmi les cinq puissances à droit de veto. Les Français ne doivent jamais l'oublier.
Vous trouverez ci-dessous quelques photographies du monument dont celles des cérémonies en mémoire du sacrifice de Pierre Rialland :
- Cérémonie du 4 août 2006 sous la présidence de M. Jacques Lannou Sous-Préfet d'Ancenis, de M. Patrice Chevalier Conseiller général du canton de Riaillé, de M. Claude Dabo Maire de Teillé et de M. Charles Cheveau Président de l'Association des Anciens combattants de Teillé. Plusieurs intervenants rappelèrent le sacrifice de Pierre Rialland et le respect dû à sa mémoire.
- Cérémonie du 4 août 2005 sous la présidence de M. Claude Dabo Maire de Teillé et de M. Charles Cheveau Président de l'Association des Anciens combattants de Teillé. Dans une allocution, M. Robert Prod'homme du Souvenir Français y insista sur le Devoir de Mémoire envers les MORTS POUR LA FRANCE.
- Cérémonie en 1966 après le déplacement du monument du fossé au terre-plein situé entre l'ancienne route et la nouvelle, la Présidence de la cérémonie était assurée par le commandant Yacco (M. Briac Le Diouron) et M. Pierre Fraboul Président de l'une des deux amicales des anciens du maquis de Saffré.
CÉRÉMONIE DU 4 AOÛT 2009
CÉRÉMONIE DU 4 AOÛT 2006 - Inauguration de la plaque commémorative
(Photographies de M. Roland Jolivot et extrait de Ouest-France du 07/08/2006r)
CÉRÉMONIE DU 4 AOÛT 2005 - Après restauration du
monument Rialland
(Photographies de M.M. Marcel Delanoue et Paul Gasnier)
LA CROIX RIALLAND Á TEILLÉ, sur la D9, direction PANNECÉ |
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Article de la Voix du Combattant (Octobre 2005)
De M. Joseph Bricard, Secrétaire de l'UNC-AFN de Teillé (44) |
À la Thuellière a été érigée une stèle en l’honneur de Pierre RIALLAND, Mort pour la France, le 4 août 1944, lors d’une attaque d’un petit groupe de trois hommes de maquisards dont Pierre faisait partie, contre un peloton d’une cinquantaine de cyclistes Allemands, en armes et en uniformes, se repliant. Cette stèle fut, durant de nombreuses années, entretenues par des bénévoles, en particulier Madame JARDIN, veuve d’un résistant et des membres du Conseil municipal.
Aux anniversaires, une cérémonie avait lieu. Depuis 1989, d’un commun accord, ces cérémonies du souvenir ont cessé, mais l’entretien du monument n’a plus été assuré. Lors du 60ème anniversaire de cette tragédie, un survivant du groupe des trois, Monsieur André MAURAS, vint se recueillir sur les lieux et s’indigna du mauvais entretien du monument. Il le fit savoir dans un article de la presse régionale sous le titre « Le courrier des empochés », puis à la Mairie de Teillé. Celle-ci par la voix de son Maire, répondit que l’entretien de la stèle était plutôt à la charge de la famille et du propriétaire du terrain. L’association locale des AFN, par son président Charles CHEVEAU, a été informée du problème et avant que l’affaire ne fasse scandale, fit approuver à l’unanimité, par le comité de l’association AFN, la prise en charge de la rénovation du monument. Le conseil municipal a accepté de participer aux travaux lourds, à fournir les matériaux et payer les achats.
Dans ce contexte devenu conciliant, chacun œuvrant, la Croix Rialland est remise en état (L’ARMAT, association locale de rénovation des monuments anciens, contrairement à ce qui a été dit, n’a pas participé à sa rénovation).
Suite à tous ces contacts humains résultants de cette action, les responsables présidents et autres décidèrent une nouvelle cérémonie commémorant le 61ème anniversaire.
Donc le jeudi 4 août 2005, en présence de André MAURAS, seul survivant, du Maire de TEILLÉ, Claude DABO, de Robert PROD’HOMME, président du Souvenir Français, des anciens combattants de 1939-1945, AFN et sympathisants, accompagnés de 12 drapeaux des associations de JOUÉ-SUR-ERDRE, RIAILLÉ, PANNECÉ, TRANS-SUR-ERDRE, du Maquis de Saffré, du Souvenir Français et de TEILLÉ. En tout plus de cent personnes sont venues participer à cette manifestation patriotique. Un dépôt de gerbes de la part de la famille, des AFN et du Maire est fait. Notre président Charles CHEVEAU, prit la parole, retrace le fait d’armes de ce lieu le 4 août 1944 et donne une idée de la personnalité de la victime que nous honorons. Il explique le processus qui a été amené à la rénovation du monument. Robert PROD’HOMME du Souvenir Français rappelle l’historique de son association qui, depuis 1872, entretient le devoir de mémoire de tous ceux qui se sont sacrifiés pour la France.
Monsieur le Maire, Claude DABO, rend honneur à Pierre RIALLAND et retrace sa vie, remercie tous ceux qui ont œuvré à la réussite de cette commémoration puis invite toutes les personnes présentes au vin d’honneur offert par la commune dans la salle polyvalente. Une intervention parasite tendant à faire perdre à l’assistance l’émotion résultant de la commémoration est à regretter. Avant la séparation, les 12 drapeaux se sont inclinés en respect pour notre camarade Pierre RIALLAND, mort pour la France Libre.
Le secrétaire |
ETAT EN MAI 2005 DU MONUMENT RIALLAND
La Croix Rialland entre Pannecé et Teillé | Article de Ouest-France du 19/04/2005 |
(Cliché de M. Marcel Delanoue d'avril 2005) | (Témoignage de André Mauras) |
Vue du coté Teillé |
Plaque commémorative |
Vue du coté Pannecé |
DÉPLACEMENT DU MONUMENT RIALLAND EN 1966 - DECORATION DE M. Jo PUREN
(Initialement, le monument se trouvait dans le fossé, à l'endroit même, où fut retrouvé le corps le 5 août 1944. Il fut déplacé en 1966 avec l'autorisation de M. Rialland père lors de l'aménagement de la nouvelle route. La portion de l'ancienne où eut lieu l'échauffourée est visible derrière le monument.)
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